La rétrospective d’une couturière hors normes !

C’est d’abord une joie de redécouvrir ce délicat bâtiment du Palais Galliera, dont la réouverture est une belle surprise de la rentrée culturelle parisienne. On pénètre dans ce nouveau temple de la mode avec délice, tant cette façade de villa palladienne entourée de jardins avec vue sur la tour Eiffel, ne peut être que l’écrin magnifique de cette première rétrospective en France, jamais consacrée à « Coco » Chanel sur 1500 m2 ! La duchesse de Galliera, à la fin du XIXème siècle, avait créé ce luxueux écrin pour abriter sa riche collection d’art ; Coco y rentre donc en déesse dans ce qui est désormais le nouveau musée de la Mode de la ville de Paris. Une entrée magistrale pour la « Grande Mademoiselle » (1883/1971), dans une scénographie exceptionnelle, avec une présentation de 350 pièces issues des collections Galliera, du patrimoine Chanel, de musées internationaux et de collections particulières.

Chic, naturel, et désinvolte : le crédo d’une rebelle !

J’ai été véritablement séduite par la sobriété et l’audace des lignes des modèles créés dès 1920 de cette couturière qui reste encore tellement actuelle ! Une mode intemporelle qui a fait le tour du monde et quand on regarde avec attention les portraits de Coco réalisés par ses amis peintres de l’époque, on mesure encore mieux sa détermination à « créer », à promouvoir une nouvelle forme d’élégance, un chic subtil, bref un style intemporel que la multitude des pièces exposées révèle avec brio.

« Enlevez-moi ces chichis, simplifiez, dégagez le cou, desserrez la taille…Allongez le buste, donnez du dos : il faut pouvoir mettre un mouchoir, un briquet ou un bout de papier dans les poches…Rien d’inutile, tout a une fonction. »  Gabrielle Chanel

On savait qu’on allait retrouver la petite robe noire en crêpe si vivante qui nous a fait rêver, et l’emblématique tailleur de tweed, ornée de nombreux sautoirs qui complètent le « look Chanel », souvent portées avec grâce par de si nombreuses actrices comme Romy Schneider ou Anna Karénine dans les années 60.

Une mention spéciale pour cette jolie idée de scénographie : celle d’enfermer dans un écrin (pièce à part) le mythique parfum Numéro 5 lancé en 1921 où l’on peut entendre quelques phrases lancinantes de la célèbre interview de Marilyn Monroe à Life Magazine dans laquelle elle évoque sa passion pour ce parfum qu’elle porte nue comme un talisman, sa seule parure au lit !

Mon coup de cœur : « Gabrielle ou le génie de l’accessoire »

Oui c’est comme pénétrer dans la caverne d’Ali Baba de Mademoiselle… ! Les parures de Gabrielle lui permettent d’exprimer sa fantaisie, son imagination et elle s’y révèle être un vrai génie de l’accessoire : des parures mirifiques fabriquées par les grands artisans de l’époque qui font partie intégrante de la silhouette de Coco. Influences byzantines, perses, vénitiennes, celtes, tout n’est prétexte que pour mieux sublimer et rehausser la toilette de la parfaite « Mademoiselle » avec un flot incessant de bijoux fantaisie à profusion aux motifs emblématiques : épi de blé (cadeau de Salvador Dali), le lion (son signe !), le soleil, la croix ou encore le camélia. Ce camélia fut décliné sous toutes ses formes avec sa rondeur géométrique, son absence de parfum, sa couleur fétiche qui contraste parfaitement avec les robes noires ou les vestes de tweed.
Symbole des plaisirs charnels au XIX ème siècle, il devient ici un véritable atout cœur ici pour la Grande Mademoiselle !

Musée Galliera : du 1er octobre au 14 mars 2021 : ne pas oublier les nocturnes les jeudis et vendredis jusqu’à 21 heures !
Quelques ouvrages à consulter pour préparer la visite : L’irrégulière (1974) Edmonde Charles-Roux/ Gabrielle Chanel : manifeste de mode, l’album de l’exposition

Important !

Si vous êtes fascinés par les grands artisans de la Haute Couture alors l’ouverture prochaine du 19M, futur site Chanel dédié à onze métiers d’art à Aubervilliers, c’est pour vous !
Baptisé le 19M en référence à l’arrondissement parisien où il se situe et le jour de naissance de Gabrielle Chanel (le 19 août 1883). Ce centre ultramoderne va notamment accueillir onze maisons parmi lesquelles le brodeur Lesage, le bottier Massaro, l’expert de la plume et de la fleur Lemarié, le chapelier et modiste Maison Michel qui travaillent avec Chanel et autres maisons de luxe. Le bâtiment de 25.500 m² qui s’étend sur cinq niveaux et deux sous-sols a été conçu par l’architecte Rudy Ricciotti, pionnier et ambassadeur du béton, auteur – entre autres – de MuCEM à Marseille, du Département des Arts de l’Islam au Musée du Louvre et du Stade Jean-Bouin à Paris, dans un quartier populaire du nord de Paris, qui sera inauguré à l’automne 2020 et réunira 600 personnes dans des ateliers modernes et lumineux.